L'ombre d'un marin
Je me suis levé tôt pour profiter de la lumière rasante du matin
et prendre quelques clichés du centre ville au réveil.
Le soleil se lève juste au-dessus de la préfecture
et au bord de la rivière, il fait un froid de canard.
Je viens à peine de me garer quand je vois ce type
qui passe sur le trottoir d'en face avec son chien en laisse.
Au vu du nombre de couches de vêtements qui le recouvre
c'est à coup sûr un gars qui dort là où il peut,
dans un lieu forcément sans chauffage.
D'ailleurs ? A-t-il dormi ?
Ou bien, tiré par son chien
toute la nuit durant, a-t-il du errer ainsi
en attendant patiemment que le soleil donne
assez de chaleur pour que sur un banc public
il puisse enfin s'affaler et dormir tout son saoûl ?
Perdu dans ces pensées, je déclenche au débotté,
néglige le cadrage et rate l'essentiel de la scène
en tronquant l'ombre portée que révèlent
les rayons quasi horizontaux du levant.
Ce marin plaqué sur le mûr de pierres
qui semble démêler quelque aussière
était peut-être ce pauvre hère
il y a quelques années,
au temps où les mers étaient poissonneuses,
et où les ports regorgeaient de flotilles bariolées.